Craintes pour la santé d’un prisonnier d’opinion
Le défenseur des droits humains dano-bahreïnite Abdulhadi Al Khawaja a souffert d’une arythmie cardiaque en début de soirée le 28 février 2023. Il a été conduit à l’infirmerie de la prison, puis transféré à l’Hôpital des forces de défense de Bahreïn, où un médecin a déclaré qu’il devait être examiné de toute urgence par un cardiologue. Pendant qu’il recevait des soins à l’hôpital, un homme en civil qui s’est présenté comme le chef de la sécurité de l’hôpital a déclaré qu’il devait être menotté. Abdulhadi Al Khawaja a refusé et a alors été ramené à la prison de Jaww sans avoir été ni vu ni examiné par un cardiologue. Abdulhadi Al Khawaja est un prisonnier d’opinion, qui doit être libéré immédiatement et sans condition.
COMPLÉMENT D’INFORMATION
Abdulhadi Al Khawaja est un défenseur des droits humains de premier rang et prisonnier d’opinion de 61 ans, également fondateur du Centre du Golfe pour les droits humains et du Centre bahreïnite des droits humains. Jusqu’au début de l’année 2011, il était coordonnateur de la protection pour la région MENA pour le groupe de défense des droits humains Frontline Defenders. Il a également participé à une mission d’établissement des faits en Irak d’Amnesty International en 2003 et est membre du Réseau consultatif international du Centre de ressources sur les entreprises et les droits de l’homme. Ce militant pacifique des droits humains a reçu plusieurs prix en rapport avec les droits humains, notamment le Dignity - World without Torture Award en octobre 2013. En 2022, il a obtenu le prestigieux prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits de l’Homme. Abdulhadi Al Khawaja purge une peine d’emprisonnement à perpétuité à la prison de Jaww pour son rôle dans la direction des manifestations pendant le soulèvement populaire de 2011 à Bahreïn.
Entre le 11 et le 15 mars 2023, Bahreïn a accueilli la 146e Assemblée de l’Union interparlementaire à Manama, une réunion annuelle de parlementaires du monde entier. Des parlementaires du Danemark, de Suède, d’Irlande, d’Islande, des Pays-Bas, de Finlande et de Norvège ont appelé à la libération d’Abdulhadi Al Khawaja. La délégation danoise a demandé l’autorisation de lui rendre visite en prison mais cette requête a été ignorée.
Le 6 novembre 2022, lors d’un appel avec ses filles, Abdulhadi Al Khawaja a déclaré qu’il allait faire l’objet de plusieurs nouveaux procès. Le 3 novembre 2022, son premier procès s’est ouvert en son absence devant le deuxième tribunal pénal de première instance. Il était accusé d’avoir cassé une chaise en plastique en novembre 2021 et d’avoir insulté un policier à la prison de Jaww après s’être vu refuser un appel à ses filles qui vivent à l’étranger. Le 21 novembre 2022, son second procès s’est ouvert pour des accusations d’outrage à un fonctionnaire. L’affaire est liée à des événements survenus le 30 mars 2022, lors desquels Abdulhadi Al Khawaja a protesté contre l’accord de normalisation des relations diplomatiques avec Israël (accords d’Abraham) et a dit à un agent pénitentiaire: «Vous êtes une personne sale. Vous traitez les gens comme des animaux.»
Le 28 novembre 2022, le tribunal l’a déclaré coupable et l’a condamné à une amende dans le cadre des deux affaires. Les deux affaires ont été présentées à la deuxième haute cour criminelle d’appel. Le 29 décembre 2022, le tribunal a repoussé au 5 janvier 2023 l’audience pour la première affaire dans le cadre de laquelle il avait été déclaré coupable et condamné à une amende de 60 dinars bahreïnites pour avoir cassé une chaise et insulté un fonctionnaire. Le tribunal a également statué qu’Abdulhadi Al Khawaja n’avait pas le droit de faire appel de sa déclaration de culpabilité et de son amende de 100 dinars bahreïnites prononcées dans le cadre de la deuxième affaire pour outrage à un fonctionnaire.
Abdulhadi Al Khawaja n’a été autorisé à assister à aucune des audiences.
Le 5 janvier 2023, son avocat a remis au président du tribunal une lettre dans laquelle Abdulhadi Al Khawaja déclarait avoir dit à son avocat de se retirer de l’audience s’il ne pouvait pas recevoir sa visite avant l’audience ou s’il n’était pas autorisé à y assister. Abdulhadi Al Khawaja n’a en effet pas été conduit au tribunal, son avocat s’est retiré de l’audience et le juge a confirmé sa déclaration de culpabilité et son amende. Le lendemain, Abdulhadi Al Khawaja a appelé ses filles et leur a dit que des surveillants pénitentiaires l’avaient attiré dans le bâtiment de l’administration pénitentiaire au prétexte d’un appel de son avocat, pour finalement le conduire dans la salle des gardes pour le confronter à l’agent qu’il avait été déclaré coupable d’avoir insulté. Abdulhadi Al Khawaja a résisté et a commencé à crier et à scander des slogans. Le 8 janvier, il a été informé qu’il ne pourrait plus s’entretenir au téléphone avec son avocat. Le 6 mars 2023, Abdulhadi Al Khawaja a enfin pu recevoir la visite de son avocat.
Le 15 décembre 2022, le Parlement européen a adopté une résolution d’urgence concernant Abdulhadi Al Khawaja et d’autres prisonniers d’opinion et demandant leur libération. Le 27 décembre 2022, il a rencontré son avocat pour la première fois en prison.
En mai 2012, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a conclu que la détention d’Abdulhadi Al Khawaja était arbitraire, car elle était liée à l’exercice de ses droits aux libertés d’expression, d’association et de réunion pacifique, et a appelé à sa remise en liberté immédiate et à rendre effectif le droit à réparation.
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Modèle de lettre
Monseigneur,
Le défenseur des droits humains Abdulhadi Al Khawaja, emprisonné arbitrairement depuis près de 12 ans maintenant pour avoir simplement exercé ses droits aux libertés d’expression et de réunion pacifique pendant le soulèvement populaire de 2011 à Bahreïn, a été transféré à l’infirmerie de la prison de Jaww en début de soirée le 28 février 2023. Un médecin a plus tard déclaré qu’il avait souffert d’une arythmie cardiaque. Il a passé un électrocardiogramme et le médecin a recommandé son transfert vers l’Hôpital des forces de défense de Bahreïn. Abdulhadi Al Khawaja a accepté le transfert après avoir reçu l’assurance des autorités pénitentiaires qu’il ne serait pas menotté. Aux urgences de l’Hôpital des forces de défense de Bahreïn, il a passé un autre électrocardiogramme et a reçu une injection intraveineuse qui a stabilisé son rythme cardiaque. Le médecin a déclaré qu’il devait être examiné de toute urgence par un cardiologue. Pendant qu’il recevait des soins à l’Hôpital des forces de défense de Bahreïn, alors qu’il se trouvait toujours dans la salle d’examen, un homme en civil s’est présenté comme le chef de la sécurité de l’hôpital et a ordonné qu’il soit menotté. Abdulhadi Al Khawaja a refusé d’être menotté et a quitté la pièce. Il a été renvoyé en prison sans avoir été ni vu ni examiné par un cardiologue. Dans un article publié par le journal Al Ayam le 7 mars 2023, l’administration des hôpitaux publics a déclaré qu’un rendez-vous pour Abdulhadi Al Khawaja avec un cardiologue était prévu pour le 19 mars. Ni Abdulhadi Al Khawaja ni sa famille n’en avait été informé.
Le 13 février 2023, Abdulhadi Al Khawaja a été examiné par un ophtalmologue qui a été conduit à la prison de Jaww sans équipement, mais qui a déterminé que le glaucome d’Abdulhadi Al Khawaja s’était aggravé, et lui a prescrit des gouttes pour les yeux et des lunettes. Le 2 mars 2023, Abdulhadi Al Khawaja a été transféré à l’Hôpital des forces de défense de Bahreïn pour un rendez-vous avec un ophtalmologue. Alors qu’il avait conclu un accord avec les autorités selon lequel il ne serait pas menotté, il l’a été fermement dès son arrivée à l’hôpital.
Nous demandons à Votre Altesse de libérer Abdulhadi Al Khawaja immédiatement et sans condition, car cet homme est un prisonnier d’opinion emprisonné uniquement pour avoir exercé pacifiquement ses droits humains. En attendant sa libération, en raison de ses graves problèmes de santé, nous vous demandons de veiller à ce qu’il bénéficie de soins de santé adaptés en temps opportun, conformément aux normes internationales relatives aux droits humains, à ce qu’il reçoive dans les meilleurs délais des informations sur son accès aux soins et à ce qu’il soit protégé de tout acte de torture ou mauvais traitement.
Veuillez agréer, Votre Altesse, l’expression de ma haute considération.
Appels à
Prince héritier et Premier ministre
Sheikh Salman bin Hamad Al Khalifa
(Court of the Crown Prince, P.O Box 29091, Riffa – Bahrain)
E-mail (via contact form): http://www.crownprince.bh/en/contact
Twitter: @bahrainCPnews @BahrainPMO
→ Il est fortement suggéré de cibler les autorités sur les réseaux sociaux. L’envoi des lettres à des adresses postales officielles à Bahreïn a été généralement inefficace ces dernières années - la plupart de ces lettres sont traitées comme non distribuables et renvoyées; d'où la préférence donnée au ciblage électronique des messages, qui a également l'avantage d'être public et donc potentiellement plus efficace pour faire pression sur les autorités en exposant leur comportement indéfendable dans des forums ouverts.
Le ciblage électronique peut être effectué soit via un simple Tweet, soit en scannant/photographiant des lettres manuscrites et en les publiant sous forme de Tweet. Dans les deux cas, assurez-vous de taguer le prince héritier et le premier ministre et le ministre de la Justice.
Copies à
Minister of Interior
Sheikh Rashid bin Abdullah Al Khalifa
(Ministry of Interior, P.O. Box 13, Manama, Bahrain)
Fax: +973 1723 2661
Twitter: @moi_Bahrain
Ambassade du Royaume de Bahreïn
Place des Etats-Unis 3bis
F-75116 Paris, FRANCE
Fax: 00331 / 47 20 55 75
E-mail: ambassade@ambahrein-france.com ; paris.mission@mofa.gov.bh
Possible réponse à votre lettre
Il est possible que vous recevriez une réponse à votre lettre d'appel. Vous n'êtes pas tenu de répondre vous-même, mais nous vous serions reconnaissants de bien vouloir nous envoyer cette lettre de réponse. Idéalement scannée par e-mail à ua@amnesty.ch. Nous transmettons les réponses à l'équipe de recherche concernée (via le secrétariat international d'Amnesty). Les collègues analysent le contenu et décident de la marche à suivre, ce qui peut se traduire par une Action urgente complémentaire.
Nous ne craignons aucune conséquence en Suisse pour les militant-es des Actions urgentes. Cependant, il peut être judicieux de ne pas écrire une lettre si vous avez l'intention de voyager dans le pays (ou d'y avoir de la famille). Cela vaut surtout pour les pays «problématiques» et répressifs. (Russie, Turquie, Chine, ...)