Condamné à la réclusion à perpétuité après avoir «avoué» sous la torture
Le ressortissant philippin Ronaldo Lopez Ulep purge actuellement une peine de réclusion à perpétuité pour espionnage dans une prison au Qatar. Il avait «avoué» sous la torture. Le jugement de son procès en appel sera prononcé le 31 mai.
Ronaldo Ulep, ancien employé civil de l'armée de l'air qatarienne, a été arrêté par des agents de la Division des enquêtes criminelles (CID) le 7 avril 2010 à son domicile à Doha, la capitale qatarienne, devant trois de ses enfants. Il a été déclaré coupable d'espionnage par un tribunal de première instance de Doha le 30 avril 2014 et a été condamné à une peine de réclusion à perpétuité après avoir été accusé d’avoir vendu des informations sur son employeur.
Ronaldo Ulep aurait été détenu au secret pendant environ un mois avant que sa famille ne soit informée de son lieu de détention. Au cours des huit premiers mois de sa détention, il a été torturé et a subi d'autres mauvais traitements. Selon des sources proches de l'affaire, au cours de deux séances d'interrogatoire, il a subi des brûlures de cigarette sur le dos et les jambes, a été forcé à ramper nu sur le sol jusqu'à ce que ses genoux soient en sang et a reçu de nombreux coups de poing et gifles. Il a ensuite été forcé à signer un document rédigé en arabe, qu'il ne pouvait pas lire, et qui a plus tard été présenté au tribunal comme contenant ses « aveux ». Ronaldo Ulep a également été incarcéré de trois à quatre jours avec les mains attachées dans le dos, et privé de sommeil par des gardes qui lui faisant croire que des membres de sa famille étaient morts. Il a été maintenu à l'isolement au bureau de la sûreté de l'État à Doha pendant quatre ans. Après sa condamnation, Ronaldo Ulep a été transféré à la prison centrale de Doha et n'a pas été autorisé à contacter sa famille, bien qu'il en ait fait la demande à deux reprises au moins.
Selon les documents du tribunal, Ronaldo Ulep a déclaré pendant son procès que ses «aveu » avaient été obtenus sous la torture et d'autres formes de mauvais traitements. Cependant, le tribunal de première instance a rejeté ces déclarations, au motif d'un manque de preuves à l'appui de ses allégations. Son procès en appel a commencé le 26 mai 2014 et cinq audiences ont eu lieu, dont certaines qui n'ont pas duré plus de 15 minutes et au cours desquelles aucune traduction n'était fournie. La Cour d'appel devrait rendre son jugement le 31 mai.
COMPLÉMENT D’INFORMATION
Deux autres ressortissants philippins font également l'objet d'accusations dans le même procès que Ronaldo Ulep. Ils ont été arrêtés en mars et avril 2010 respectivement et auraient, eux aussi, été détenus à l'isolement au bureau de sécurité de l'État jusqu'à leur procès. Tous deux ont déclaré que les « aveux » qui ont été présentés au tribunal avaient été obtenus sous la torture. L'un d'eux a été condamné à la réclusion à perpétuité et le second a été condamné à mort. Le jugement de leur procès en appel devrait être prononcé le même jour que celui de Ronaldo Ulep.
Amnesty International a écrit à deux reprises aux autorités qatariennes à propos de ces affaires - une fois en septembre 2014 et une autre en janvier 2015 - mais n'a jamais reçu de réponse. L'organisation a également abordé la question avec l'ambassade des Philippines au Qatar.
Au cours des dernières années, Amnesty International a reçu des informations faisant état d'affaires dans lesquelles la torture et de mauvais traitements sont utilisés pour contraindre les détenus à « avouer » ou à fournir des informations. Dans la plupart des cas signalés, les faits ont eu lieu avant que les détenus ne soient inculpés ou jugés, surtout pendant des périodes de détention au secret aux mains des services de sécurité de l'État. Des militants qatariens ont exprimé leur inquiétude quant au fait que des agents de la sûreté de l'État, généralement en civil, procèdent à des arrestations sans décliner leur identité et placent ensuite les personnes arrêtées dans des centres de détention de la police plutôt que dans des centres de détention gérés par la sûreté de l'État. Leur objectif est, semble-t-il, de pouvoir nier toute responsabilité dans certaines arrestations et incarcérations, et donc de contourner les critiques à propos de leurs actions.