Un prisonnier se voit refuser des soins médicaux
L’un des suspects dans l’affaire du meurtre de Boris Nemtsov, éminent militant politique russe, se plaint que les autorités lui refusent des soins médicaux adaptés et lui infligent des mauvais traitements, ce qui suscite des craintes quant à l’équité de son procès.
Tamerlan Eskerkhanov, l’un des cinq principaux suspects dans l’affaire du meurtre du militant politique Boris Nemtsov, a été appréhendé par la police le 7 mars 2015 à Moscou. Cet homme est maintenu en détention sur décision du tribunal du district de Basmanny, qui s’est prononcé sur ce cas le lendemain matin.
Son avocate a confié à Amnesty International qu’elle n’avait pas pu s’entretenir avec lui pendant sa première semaine de détention. Elle affirme que les autorités refusent à son client le traitement dont il a besoin, celui-ci souffrant d’une insuffisance rénale des suites d’un accident survenu alors qu’il servait dans la police en 2007. Elle a essayé à plusieurs reprises de lui faire passer ses médicaments mais l’administration du centre de détention ne l’y a autorisée que deux semaines après l’arrestation de son client. Tamerlan Eskerkhanov souffre également d’un problème au coccyx. Son état s’est aggravé depuis qu’il est en détention et il a besoin d’une intervention chirurgicale, d’après son avocate.
En raison de sa santé défaillante, cet homme a fait un malaise lors d’une audience le 24 avril dernier. Une ambulance est arrivée et les médecins ont annoncé qu’il avait besoin de soins de toute urgence, mais le juge a décidé de poursuivre l’audience.
Tamerlan Eskerkhanov s’est également plaint d’avoir été privé de sommeil, d’eau et de nourriture pendant les deux premiers jours de sa détention. Il affirme qu’en une occasion, alors qu’il était conduit du centre de détention au tribunal, un policier a mis le feu à sa barbe et des agents ont resserré ses menottes et l’ont insulté, ainsi que sa femme. En outre, il a indiqué que lors de la fouille corporelle à l’entrée du tribunal, des policiers ont pris des photos de lui nu avec leurs téléphones portables.
Cet homme a été transféré vers différents centres de détention. Il se trouve actuellement au centre de détention provisoire FKU SIZO n° 6 à Moscou.
COMPLÉMENT D’INFORMATION
Boris Nemtsov, qu’Amnesty International considérait comme un prisonnier d'opinion lorsque celui-ci purgeait une peine de «détention administrative» en janvier 2011 à la suite d’une manifestation pacifique, a été abattu le 27 février 2015 dans le centre de Moscou (voir https://www.amnesty.org/en/articles/news/2015/02/russia-murder-of-boris-nemtsov-must-be-meaningfully-investigated/). Son meurtrier s’est enfui. Vladimir Poutine a déclaré qu’il surveillerait personnellement l’avancée de l’enquête.
En mars 2015, le tribunal de Basmannyi, à Moscou, a autorisé l’arrestation de cinq suspects: Zaour Dadaïev, Anzor Goubachev, Chaghid Goubachev, Khamzat Bakhaïev et Tamerlan Eskerkhanov. Eva Merkatcheva et Andreï Babouchkine, membres de la Commission de surveillance publique, leur ont rendu visite en détention le 10 mars dernier et signalé les allégations de torture et d’autres mauvais traitements formulées par Zaour Dadaïev et Chaghid Goubachev. Le Comité d’enquête de la Russie auprès du parquet général a déclaré que rapporter ces propos pourrait s’apparenter à une «ingérence dans le travail des enquêteurs, dans le but d’empêcher une enquête approfondie et objective sur cette affaire». Ces deux défenseurs des droits humains risquent d’être inculpés de charges pénales, ce qui suscite des craintes quant à l’impartialité de l’enquête (voir https://www.amnesty.org/en/articles/news/2015/03/russian-activists-threatened-with-criminal-charges-after-raising-torture-allegations), de même que les allégations de mauvais traitements formulées par les suspects dans cette affaire, à moins qu’elles ne fassent l’objet sans délai d’une enquête minutieuse, efficace et impartiale.
Nom : Tamerlan Eskerkhanov